Il y a quelques mois, Cécile est venue me voir parce qu'elle ne parvenait plus à porter les vêtements qui se trouvaient dans sa garde-robe, suite à une prise de poids récente. Cette situation allait probablement durer puisque Cécile venait d'arrêter de fumer et qu'elle était bien décidée à ne plus recommencer. Me voilà face à un grand classique : accompagner une personne qui se voit obligée de changer de garde-robe, renoncer à porter des vêtements dans lesquels elle a investi et qu'elle aime, à cause de sa nouvelle silhouette. Je constate, chaque fois, combien c’est vécu avec inconfort. Et c’est bien normal puisque plusieurs pressions s'exercent alors sur la personne : l'inconfort physique (les mouvements du corps ne se font plus de la même façon, quand ça n'est pas la santé qui est impactée), le regard des autres - la plupart du temps ressenti comme jugeant et dévalorisant -, et, plus dérangeant encore : le regard sur soi-même – cette sensation de décalage, d’incohérence, voire d'étrangeté à soi-même. Ne plus se reconnaître dans le miroir, quoi de plus déstabilisant ?
Comme quoi, il ne s'agit pas que d'apparence, mais de quelque chose de réellement profond : l'identité, qui s'exprime en premier lieu par notre personne physique, cette entité matérielle qu'est notre corps.
Comment se sentir bien dans son « nouveau » corps ?
Alors, comment accompagner une personne afin qu'elle se sente mieux avec son « nouveau » corps ? Pour commencer, j'ai félicité Cécile pour sa démarche : arrêter de fumer et donc améliorer sa santé – le meilleur des choix – et s'engager dans un travail sur le regard qu'elle porte sur elle-même. C'est vraiment courageux de renoncer à des béquilles (pas toujours bénéfiques) pour avancer sur son chemin. Et cela mérite d'être gratifié.
Tout au long du parcours que je propose, Cécile et moi avons cheminé à travers ses couleurs, les matières et les coupes dans lesquelles elle se sent à l'aise et qui la mettent en valeur – quelle que soit sa silhouette – et son style. Et ce que nous avons trouvé ensemble, au-delà d'une image agréable et confortable, c'est le vrai corps de Cécile. Elle avait enfin compris qu'il fallait lui donner sa place. L'enjeu véritable était que Cécile trouve sa véritable identité, et l'accepte à l'aide de vêtements qui s'adaptent à elle, et non l'inverse.
Notre corps est notre première maison
Une autre des personnes que j'ai déjà accompagnées m'a dit un jour « Mon corps, c'est ma maison »*. D'ailleurs, quand nous sommes désorienté·e·s par des événements de la vie, perdu·e·s au milieu de situations problématiques et contradictoires, nous disons « Je ne sais plus où j'habite ». Le tourment est aussi bien physique que psychique.
Dans le film Petite fille de Sébastien Lifschitz, on voit bien, dans un cas extrême (celui des personnes transgenres), comme il est crucial d'être dans son vrai corps. Ici, un des moyens pour cette toute jeune personne d'exprimer son « être fille » est de s'habiller selon les codes vestimentaires des petites filles. Il est frappant comme l'habillement a pour elle un pouvoir et une place extrêmement importante – pour tous les protagonistes du film, d'ailleurs, puisque le personnel de l'école lui conteste le droit de s'habiller « en fille ». C'est dire à quel point l'habillement est un marqueur d'identité – et, avant cela, un moyen de la construire. L'habillement - cette deuxième maison - est le premier outil que la petite fille emploie pour manifester son individualité et sa personnalité.
Pour en revenir à Cécile et sa problématique : elle aussi a compris la puissance de l'habillement pour s'apprivoiser et s'accueillir elle-même. L'habillement peut être ressenti comme une contrainte terrible lorsqu'il n'est pas approprié – et un soutien formidable lorsqu'il est aligné avec soi-même.
* Au sujet des liens étroits entre notre corps et notre habitat : voir l'article d'Aurore Thiébaut, home organiser et ambassadrice Sanuni : Home Organising : notre maison cette 3ᵉ peau !
Retrouvez les accompagnements de Claire Nivlet, Coach en Image sur l’annuaire Sanuni.
